Le Sénat organisait lundi 18 juin un colloque sur les Legaltechs. Parmi les intervenants de grande qualité présents se trouvait la présidente du Conseil National des Barreaux (CNB), Me Christiane Féral-Schuhl. Comme le rapporte Le Monde du Droit, pour elle, le CNB est la première legaltech en France : « Son portail avocats.fr réunit 9.200 avocats en ligne qui génèrent en un an 32.000 consultations pour un chiffre d’affaires global de 2 millions d’euros » . Pour s’affirmer ainsi comme la première legaltech, nul doute que sa présidente pense aux outils technologiques développés par le CNB, et en premier lieu le RPVA (Réseau Privé Virtuel des Avocats) ou E-barreau.
Comment fonctionne le RPVA / E-barreau ?
Le Réseau privé virtuel des avocats (RPVA) est le réseau informatique sécurisé de la profession d’avocat en France. Il sert aux communications électroniques des avocats, notamment dans le cadre de la dématérialisation des procédures avec les juridictions judiciaires, elles-mêmes reliées entre elles dans le cadre du réseau privé virtuel justice (RPVJ). Il a été créé en 2005. (Source : Wikipédia)
Le RPVA permet également de sécuriser les communications électroniques et le réseau informatique du cabinet grâce à :
- un pare-feu certifié par le gouvernement français
- le chiffrement des données, certifié lui aussi par l’ANSSI diffusées par le cabinet vers le cloud des avocats
- l’authentification forte des avocats et signature électronique par certificats.
Ce réseau présentait à l’époque toutes les caractéristiques de l’innovation au service de ses membres : développé par l’Ordre, au profit des avocats de toute la France, dans le but de simplifier la communication avec les juges, et simple d’utilisation.
Le RPVA est-il une fonctionnalité Legaltech ?
L’outil s’est modernisé progressivement, d’abord en permettant une interopérabilité (partielle) avec les solutions cloud (Jarvis Legal a été le premier éditeur cloud labellisé). Ensuite, la suppression du boîtier Navista a renforcé les usages en mobilité et multi-équipements.
Le RPVA est donc bien un produit ouvert et cloud. De ce point de vue, son utilisation est digne d’être considérée comme tech et donc d’appartenir à la famille legaltech. Le fait que les éditeurs puissent s’interfacer avec lui, pour faciliter le transfert d’information, les échanges de mail, est un avantage important. De même, l’accès à la plateforme s’est affranchi de tout matériel, ce qui constitue également une bonne nouvelle.
Néanmoins, plusieurs difficultés subsistent. D’abord, l’interface avec le RPVA est limitée. Il n’y a pas encore la possibilité d’intégrer complètement les arborescences de dossiers de votre solution de gestion avec ebarreau. Idem pour les échanges de mails et leur notification, qui sont difficilement intégrables à votre logiciel de gestion de cabinet. Enfin, la clé de connexion est un frein à un usage mobile réel, notamment smartphone.
RPVA, innovation numérique ou révolution Legaltech ?
Le terme Legaltech est très à la mode. Beaucoup d’acteurs se revendiquent de la legaltech, dont un certain nombre d’éditeurs logiciels. Cependant, il ne faut pas confondre numérique et legaltech. Sinon, développer une application mobile fait-il de vous une legaltech ? Ou bien proposer un portail numérique ?
Au delà de la fonctionnalité, c’est aussi l’usage et le modèle économique qui définit une legaltech. Quelques caractéristiques que partagent les legaltechs :
- être une start-up ou à tout le moins une jeune entreprise agile.
- un modèle économique original
- un réel partage des données via API (protocole technique de partage de données entre applications)
- mettre l’utilisateur au centre de l’approche (en l’occurrence l’avocat)
- une ergonomie et une facilité fonctionnelle nouvelle
De ce point de vue, le CNB, au travers du RPVA ou de l’acte d’avocat qui sont des innovations technologiques utiles bien qu’elles nécessitent des mises à jour, n’est pas une legaltech. Simplement une organisation qui se modernise, ce qui est déjà remarquable !